Après avoir abandonné des fragments de ma vie, j’ai voulu me pencher sur ce qui reste, l’après, ce que nous laissons : la trace ou l’empreinte. Et bien sûr, le pied ou la main me sont apparus comme une évidence. Mais lequel de ces deux sujets ? En creusant cette idée, je me suis aperçue que la frontière entre empreinte et trace est très mince. Souvent elles se confondent, se superposent. L’une et l’autre jouant à prendre la première place, mais qu’en est-il ? Car une empreinte peut devenir une trace comme la trace une empreinte…
Alors j’ai décidé que je ne pouvais pas les dissocier et qu’il serait intéressant de voir comment chaque personne définit la trace et l’empreinte. Et, bien sûr, le pied et la main, ensemble aussi. Les empreintes laissent des traces ? où les traces laissent des empreintes ?
Déjà en lui-même, le Projet Totem travaille sur ces deux sujets : l’empreinte avec le transfert (ce qu’il en reste), la trace avec la photo.
Lorsqu'on lit les définitions de chacun des mots, l’on voit bien comment les deux se télescopent… Mais l’on pourrait dire que la trace n’est pas matérialité, elle est subjective dans son interprétation et qu’a contrario l’empreinte n’évolue pas dans le temps, elle est figée, incrustée dans la matière.
Les traces/empreintes s’inscrivent dans tous les processus de la vie. Bases de transmissions dans les domaines générationnels, artistiques, conservation des biens culturels, de l’histoire de l’humanité, des connaissances…
En tant qu’humain, notre conscience nous pousse à nous demander « ce que nous faisons ici », quel est notre rôle dans cette vie, qu’allons-nous laisser et combien de temps avons-nous... Cette peur de l’éphémère nous pousse à laisser une trace/empreinte de notre passage dans cette vie afin qu’elle ne soit pas vaine. Espoir d’éternité…
Les traces/empreintes ne sont pas toujours visibles comme les traumas (trace) que rencontre un individu tout au long de sa vie et qui deviennent des empreintes
Elles sont à la base de toutes sociétés, liées à l’évolution de l’Homme. Nous sommes nous-même des traces/empreintes, le résultat de toutes celles qu’on nous a laissées.
Mais qu’en est-il pour chacun de nous ? Comment l’interprétons-nous ? Quelles traces/empreintes laissons-nous ? Lesquelles aimeriez-vous laisser ? Où vous situez-vous / à celles laissées par nos ancêtres ? Comment vous inscrivez-vous dans celles-ci ? Comment vivons-nous avec ? La trace est-elle amenée à disparaître, et l’empreinte à rester ?
Autant de questions auxquelles j’aimerais que ce travail permette de répondre, ou du moins apporter quelques réponses pour chacun…
L’acte III, comme pour l’acte II, se déroulera dans deux pays, à cheval entre deux cultures.
J’ai choisi le Québec, car nos cousins d’Amérique me semblent à même de réfléchir sur ce thème de par le lien de nos origines communes. Aujourd’hui, qu’en reste-t-il ? Est-ce nous qui avons laissé une trace ? eux qui en ont fait une empreinte ? Eux qui n’ont pas renoncé à leur culture d’origine avec cette volonté farouche de conserver la langue ainsi que des particularités culturelles françaises malgré la dictature culturelle qui leur a été imposée pendant des siècles. Ils s’intègrent dans la société moderne tout en conservant leur différence. Ils ont créé leurs empreintes/traces constituant ainsi leur identité culturelle propre. En tant que français nous y voyons des traces de notre passé, non dans l’architecture, le matériel, mais dans la langue et les idées, l’invisible. Il sera intéressant d’aborder cette thématique avec les québécois et connaître la vision qu’ils en ont…
Avec deux supports (main/pied), j’ai orienté mon travail de manière à ne pas trop alourdir l’exposition.
Il me paraît important qu’une même personne relie les deux thèmes et soit en quelque sorte la synthèse de ce duo. S’agissant des mains et des pieds, nous avons une partie visible (dessus du pied et de la main) et une partie cachée (plante du pied et paume de la main, qui devient visible en laissant une empreinte/trace). Cela nous permettra de travailler sur les traces/empreintes visibles et invisibles…
Dans un souci de clarté, j’ai opté pour la main comme support pour l’empreinte et le pied pour la trace.
Le transfert est réalisé sur toile de coton.
Phase 1
: ce qui est visible
La main : Qu’est-ce qu’une empreinte ?
Le pied : Qu’est-ce qu’une trace ?
Phase 2
: ce qui est invisible
La paume : Quelle trace ou empreinte aimeriez-vous laisser ?
La plante du pied : Comment vous inscrivez-vous dans celles laissées par nos ancêtres ?
Phase 3
: synthèse avec empreinte/trace de la plante du pied ou la paume de la main
Que préférez-vous laisser : trace ou empreinte ? :
Empreinte de la main (empreinte) ou du pied (trace), encre sur papier
Quelle trace ou empreinte vous a marqué ? (personnelle ou historique)